Claude Saguet

Hommage de Michel Baglin

Le feu, toujours, chez Saguet.

Non celui qui réchauffe mais, lame bleue, flamme acérée, le feu tragique qui tranche dans l’ombre et le vif.

Feu violent de l’éclair et « colère de couteaux ». Et puis la ville, ses tourbillons – « les eaux violentes d’une chose brûlée » -, son air « sonore », ses spasmes et ses lumières heurtées. Des lumières froides, parce que lointaines : étoiles.

Elles « résonnent » comme les pas perdus dans un hall déserté : pour faire sonner le vide. Cette ville qui ne se connaît qu’à ses « contours embrumés » ignore tout de ce qui l’habite et l’agite, et jusqu’à son nom.

Mais elle a ses terriers. Car à côté du feu dévorant des villes inhumaines, il y a encore l’obscur. Des sous-sols dans nos vies et nos villes.

Lieux du langage –« paroles submergées »- de la mémoire, des dérives, de l’humain bafoué.

Cendres, oui, mais où veillent encore des braises. Car c’est bien dans ces caves que le feu prend racine.

Le feu sauvage nourri de cette « rage têtue qui nous brûle la voix en buvant le silence ».

Salvateur pourtant.

Ainsi, les « chaudières meurtries » des villes ne sont-elles que des paysages intimes, le reflet d’un « mal étrange » qui est la difficulté de l’homme à habiter sa vie : son feu intérieur.

Seilh, mars 1993.

M. BAGLIN.