Gilles Vigneault
Nos arpents de neige et de rêves
Quand j’aurai dépassé vos pièges, les loups mangeront dans ma main, première neige...
L’homme de Natashquan a dépassé tous les pièges des hommes, et les mots du monde lui ont mangé dans la main.
La nuit, le jour
L’été, l’hiver Il faut dormir le cœur ouvert.
Gilles aura eu le cœur sur la main en toutes saisons, en toutes chansons.
Au doux milieu de nous, avec les chats sauvages qui maraudent dans sa voix, Gilles Vigneault nous redonne tous les arpents de neige enfouis en nous.
Depuis Jos Montferrand en 1969, plus de trois cents chansons ont tracé une répétition à l’infini d’un seul message d’amitié.
Des istorlets chantent pour saluer Monsieur Vigneault, portageur d’espérances, tisserand des jours simples et des amours difficiles.
Symbole d’une nation, porteur d’un pays qui n’est pas l’hiver, et d’un peuple qui se met debout, il a su faire passer les parlures et les « tite-tounes » de son Québec.
Ce désir de poudrerie et maintenant en nous et nous savons que ce n’est point mensonges.
Ce n’est pas tant le Québec des villes, mais celui des lacs habillés en dimanche, des bourdonnements de la scie des bûcherons, des coups de whisky blanc des trappeurs.
Désormais le fleuve Saint-Laurent coule au milieu de nous. Quelques baleines remontent l’eau et viennent chanter dans ses contes pour dire avec lui : j’ai mal à la terre.
Les initiales de Gilles sont gravées dans nos écorces intérieures. Depuis la révélation en 1967 jusqu’à sa dernière tournée pour ses 75 ans dont quarante-trois ans de chansons, nous savons que l’hiver ne tarde plus à passer car un conteur des plis du monde fait reculer la noirceur. Cet arbre fier né en 1928 à Natashquan aura merveilleuse hirondelle toujours retourné dans son village de pêcheurs. Il a planté un chêne au milieu de nous.
Avant tout comédien, puis conteur et chanteur, Gilles, auréolé de sa crinière blanche, nous a appris à nommer les pays et les gens.
Il a recréé notre pays imaginaire des contes de veillée et c’est lui le feu de feuilles dans l’âtre.
Souvent rencontré en ces lieux à lui fidèle, la Salle Nougaro et l’espace Altigone de Saint-Orens, nous avons échangé livres et boules de neige de mots. À moi il me fut donné de lui faire découvrir quelque poésie française et surtout René Guy Cadou, à lui de me faire découvrir le monde et ses drôles d’atours.
« Le héros attire la foudre » disait-il, mais le très grand poète Vigneault attire lui la pluie bienfaisante. Merci Gilles pour cette tendresse du large.
Toi tu as chanté les femmes-rivières, les géants maladroits et rebelles, et toutes vies minuscules, merveilleuses, et surtout l’amour ce long voyage.
Car tu sais plus d’histoires que le vent lui-même.
Chemin faisant, tu as semé les îles de l’enfance, des doux chagrins, tu nous auras fait retrouver le Nord du Nord. Il passe désormais par nos épaules et par nos pôles.
J’ai du vent du Nord
À mettre en bouteille
Du vent qui réveille
Avant d’endormir.Le ventre doux des lacs, l’odeur des premières neiges, les traces de pas dans le ciel, tu nous l’auras donné. Quand s’efface ce Québec mythique, mais nous habitons désormais les rêves d’un autre.
La mer ne fait plus son lit ni sur les plages ni sur la lune, mais quelqu’un porte encore ses soupirs, c’est toi Gilles.
Hélas tu n’auras pas réussi à ébranler la conscience politique de Québécois, et ceci reste une blessure en toi. Son pays n’était pas un territoire nationaliste mais un pays imaginaire de l’amour et de l’utopie.
Nos pieds se surprennent à danser tout seul, nos âmes se mettent à fredonner.
Tu as appris le dur métier de navigateur, mais ton rire énorme te sert de boussole.
Poète d’envergure et chanteur, tu nous as rendus proche et bienfaisante la poudrerie, tu as fait résonner le piano muet, un de tes plus beaux contes.
« J’ai sorti ma maison de ma poche, et c’était un harmonica » Et le poète chantant nous a montré les traces au travers des glaces. Il paraît que maintenant "La mer est un berceau qui attend, L’amour est un vaisseau qui attend, La mort est un chemin qui attend". Simplement depuis que tu chantes.
En jouant en dansant en contant, tu n’auras rien laissé se perdre à la ronde. Orpailleur des rêves tu as laissé bien des pépites.
Bientôt hélas tu nous diras « De l’herbe à la neige et par vingt pays, je vous dis adieu et ne m’en vais point ».
Non tu ne peux t’en aller, même pas à la pêche, toi qui as brisé des silences, bâti des ponts et renversé les faux-semblants de la solitude.
J’irai demander au lièvre, j’irai demander au loup de te garder parmi nous.
Tu es pour nous la chanson de l’eau, nous avons encore si soif.
Et puis ton âme est une femme fidèle, ne nous oublie pas toi qui nous as appris : « C’est demain que j’avais vingt ans ».
Et puis prend les « chemins de pied » ces petits sentiers imaginaires parcourus très lentement entre émerveillement et rosée, entre renard et hommes…
« ce sont les véritables lignes de la main d’un village ; des chemins construits très lentement par les pas de ceux qui sont passés ; des chemins qui donnent l’occasion de se rendre quelque part. » Nous sommes allés quelque part avec toi, avec ta douce errance, le village montre au loin ses fumées.
« Il y a longtemps très longtemps que ta complainte est entrée en moi, « Depuis longtemps je l’eus reconnue entre maintes », elle est si profond en moi qu’elle est moi. Elle me dit Gilles que toi aussi tu n’as pas encore eu ta part de retour d’hirondelles.
Alors reste encore je vais nous faire du feu à nous deux, nous lirons du Cadou, tu me liras tes derniers poèmes.
Reste encore un peu, Gilles.
Merci d’avance Gilles, toi qui es un pas qui passe d’eau en eau.
«On n’a pour nommer l’espace
Qu’un pas qui passe de l’eau a l’eau
Je ne suis qu’un mot qui danse
Sur ton silence comme un caneau.»
Gil Pressnitzer
Textes de Gilles Vigneault
JE CHANTE POUR
Je chante pour ne pas courir
Je chante pour ne pas mourir
Pour oublier que mon chemin
Ne va pas plus loin que ma main
Pour oublier que l’escalier
N’est pas plus haut que mon soulier
Et que le mur vient de lui-même
A ma rencontre et que je t’aime
Pour en prier
Je chante pour ne pas courir
Je chante pour ne pas mourir
Pour oublier le corridor
Au bout duquel le cœur s’endort
Pour oublier qu’on n’y peut pas
Reculer son ombre d’un pas
On s’arrête on se tourne on cause
On fait semblant qu’on se repose
Le cœur qui bat
Je chante pour ne pas courir
Je chante pour ne pas mourir
Pour me raconter que ma peur
Ne trompe pas mon corps trompeur
Pour lui repeindre un peu le bout
Des doigts qu’elle a nombreux et doux
Pour que je ne sais quoi, demeure
Semblant de nous pour mettre une heure
Le temps debout
Je chante pour ne pas courir
Je chante pour ne pas mourir
Pour dire à qui sera vivant
Que dans son corps d’auparavant
J’aimais la neige et le ciel gris
Qui ressemble à du temps surpris
Hors de lui-même et de l’horloge
Pour dire aux âmes que je loge
J’avais compris
Je chante pour ne pas courir
Je chante pour ne pas mourir
Et pour nommer trois inconnus
Qui sans le savoir ont tenu
Le journal de bord des humains
À travailler de leurs deux mains
Chanter la femme et nommer l’homme
Le meilleur côté de la pomme
Est pour demain
Je chante pour me départir
De moi-même avant que partir
© Les éditions du Vent qui Vire
PENDANT QUE
Pendant que les bateaux
Font l’amour et la guerre
Avec l’eau qui les broie
Pendant que les ruisseaux
Dans les secrets des bois
Deviennent des rivières
Moi, moi, je t’aime (bis)
Pendant que le soleil
Plus haut que les nuages
Fait ses nuits et ses jours
Pendant que ses pareils
Continuent des voyages
Chargés de leurs amours
Moi, moi, je t’aime (bis)
Pendant que les grands vents
Imaginent des ailes
Aux coins secrets de l’air
Pendant qu’un soleil blanc
Aux sables des déserts
Dessine des margelles
Moi, moi, je t’aime (bis)
Pendant que les châteaux
En toutes nos Espagnes
Se font et ne sont plus
Pendant que les chevaux
Aux cavaliers perdus
Traversent des montagnes
Moi, moi, je t’aime (bis)
Pendant qu’un peu de temps
Habite un peu d’espace
En forme de deux cœurs
Pendant que sous l’étang
La mémoire des fleurs
Dort sous son toit de glace
Moi, moi, je t’aime (bis)
© Les éditions du Vent qui Vire
METTEZ VOTRE PARKA
Ce sont les gens de ce pays
Un gros navire ils ont bâti
Pour aller sur l’eau, sur l’onde
Allez voir au bout du monde
Mettez votre parka, je mets le mien
Vous verrez d’où ce que le vent vient
Du blé, du sel pis des berris
Ont embarqué des pleins barils
Pour aller sur l’eau, sur l’onde
Allez voir au bout du monde
Mettez votre parka, je mets le mien
Vous verrez d’où ce que le vent vient
Ajouté trois barils de whisky
Pour saluer tous leurs amis
Pour aller sur l’eau, sur l’onde
Allez voir au bout du monde
Mettez votre parka, je mets le mien
Vous verrez d’où ce que le vent vient
Par une grande brise ils sont partis
Trois jours après la mer a pris
Pour aller sur l’eau, sur l’onde
Allez voir au bout du monde
Mettez votre parka, je mets le mien
Vous verrez d’où ce que le vent vient
Abordé l’île à grand péril
Ohé ! y a t-il du monde ici
Pour aller sur l’eau, sur l’onde
Allez voir au bout du monde
Mettez votre parka, je mets le mien
Vous verrez d’où ce que le vent vient
Ils se sont vus bien accueillis
Le sort de nous a pas trahis
Pour aller sur l’eau, sur l’onde
Allez voir au bout du monde
Mettez votre parka, je mets le mien
Vous verrez d’où ce que le vent vient
Le capitaine dit mes amis
Faudra passer l’hiver ici
Pour aller sur l’eau, sur l’onde
Allez voir au bout du monde
Mettez votre parka, je mets le mien
Vous verrez d’où ce que le vent vient
Mais dès qu’on fut au mois d’avril
L’envie d’amour les a repris
Pour aller sur l’eau, sur l’onde
Allez voir au bout du monde
Mettez votre parka, je mets le mien
Vous verrez d’où ce que le vent vient
Qui cueille fleur en perd le fruit
Au mois d’octobre ils ont compris
Pour aller sur l’eau, sur l’onde
Allez voir au bout du monde
Mettez votre parka, je mets le mien
Vous verrez d’où ce que le vent vient
Fallut sortir piège et fusil
Fallut se bâtir un abri
Pour aller sur l’eau, sur l’onde
Allez voir au bout du monde
Mettez votre parka, je mets le mien
Vous verrez d’où ce que le vent vient
Le bateau dans la glace est pris
Des cométiques se sont construits
Pour aller sur l’eau, sur l’onde
Allez voir au bout du monde
Mettez votre parka, je mets le mien
Vous verrez d’où ce que le vent vient
Pour retourner voir leurs amis
Et pour fonder plus d’un pays
Pour aller sur l’eau, sur l’onde
Allez voir au bout du monde
Mettez votre parka, je mets le mien
Vous verrez d’où ce que le vent vient
Chanter, danser nous divertit
Mais loin de la mer marin s’ennuie
Ils repassent par ici
Pour aller sur l’eau, sur l’onde
Allez voir au bout du monde
Mettez votre parka, je mets le mien
Vous verrez d’où ce que le vent vient
© Les éditions du Vent qui Vire
Les gens de mon pays
Les gens de mon pays
Ce sont gens de paroles
Et gens de causerie
Qui parlent pour s’entendre
Ils parlent pour parler
Il faut les écouter
C’est parfois vérité
Et c’est parfois mensonge
Mais la plupart du temps
C’est le bonheur qui dit
Comme il faudrait de temps
Pour saisir le bonheur
À travers la misère
Émmaillée au plaisir
Tant d’en rêver tout haut
Que d’en parler à l’aise
Parlant de mon pays
Je vous entends parler
Et j’en ai danse aux pieds
Et musique aux oreilles
Et du loin au plus loin
De ce neigeux désert
Où vous vous entêtez
À jeter vos villages
Je vous répéterai
Vos parlers et vos dires
Vos propos et parlures
Jusqu’à perdre mon nom
Ô voix tant écoutées
Pour qu’il ne reste plus
De moi-même qu’un peu
De votre écho sonore
Je vous entends jaser
Sur les perrons des portes
Et de chaque côté
Des cléons des clôtures
Je vous entends chanter
Dans la demi-saison
Votre trop court été
Et notre hiver si long
Je vous entends rêver
Dans les soirs de doux temps
Il est question de vents
De vente et de gréements
De labours à finir
D’espoir et de récolte
D’amour et du voisin
Qui va marier sa fille
Voix noires voix durcies
D’écorce et de cordages
Voix des pays plain-chant
Et voix des amoureux
Douces voix attendries
Des amours du village
Voix des beaux airs anciens
Dont on s’ennuie en ville
Piaillerie d’écoles
Et palabres et parages
Magasin général
Et restaurant du coin
Les ponts, les quais, les gares
Tous vos cris maritimes
Atteignent ma fenêtre
Et m’arrachent l’oreille
Est-ce vous que j’appelle
Ou vous qui m’appelez
Langage de mon père
Et patois dix-septième
Vous me faites voyage
Mal et mélancolie
Vous me faites plaisir
Et sagesse et folie
Il n’est coin de la terre
Où je ne vous entende
Il n’est coin de ma vie
À l’abri de vos bruits
Il n’est chanson de moi
Qui ne soit tout faite
Avec vos mots vos pas
Avec votre musique
Je vous entends rêver
Douce comme rivière
Je vous entends claquer
Comme voile du large
Je vous entends gronder
Comme chute en montagne
Je vous entends rouler
Comme baril de poudre
Je vous entends monter
Comme grain de quatre heures
Je vous entends cogner
Comme mer en falaise
Je vous entends passer
Comme glace en débâcle
Je vous entends demain
Parler de liberté
© Les éditions du Vent qui Vire
Il me reste un pays
Il me reste un pays à te dire
Il me reste un pays à nommer
Il est au tréfonds de toi
N’a ni président ni roi
Il ressemble au pays même
Que je cherche au cœur de moi
Voilà le pays que j’aime
Il me reste un pays à prédire
Il me reste un pays à semer
Vaste et beau comme la mer
Avant d’être découvert
Puis ne tient pas plus de place
Qu’un brin d’herbe sous l’hiver
Voilà mon Jeu et ma Chasse
Il te reste un pays à connaître
Il te reste un pays à donner
C’est ce pont que je construis
De ma nuit jusqu’à ta nuit
Pour traverser la rivière
Froide obscure de l’ennui
Voilà le pays à faire
Il me reste un nuage à poursuivre
Il me reste une vague à dompter
Homme! Un jour tu sonneras
Cloches de ce pays-là
Sonnez femmes joies et cuivres
C’est notre premier repas
Voilà le pays à vivre
Il nous reste un pays à surprendre
Il nous reste un pays à manger
Tous ces pays rassemblés
Feront l’Homme champ de blé
Chacun sème sa seconde
Sous l’Amour qu’il faut peler
Voilà le pays du monde
Il nous reste un pays à comprendre
Il nous reste un pays à changer
© Les éditions du Vent qui Vire
Le grand cerf-volant
Paroles: Gilles Vigneault.
Un jour je ferai mon grand cerf-volant
Un côté rouge, un côté blanc
Un jour je ferai mon grand cerf-volant
Un côté rouge, un côté blanc, un côté tendre
Un jour je ferai mon grand cerf-volant
J’y ferai monter vos cent mille enfants, ils vont m’entendre
Je les vois venir du soleil levant
Puis j’attellerai les chevaux du vent
Un cheval rouge, un cheval blanc
Puis j’attellerai les chevaux du vent
Un cheval rouge, un cheval blanc, un cheval pie
Puis j’attellerai les chevaux du vent
Puis nous irons voir tous les océans s’ils sont en vie
Si les océans sont toujours vivants
Par-dessus les bois, par-dessus les champs
Un oiseau rouge, un oiseau blanc
Par-dessus les bois, par-dessus les champs
Un oiseau rouge, un oiseau blanc, un oiseau-lyre
Par-dessus les bois, par-dessus les champs
Qui nous mènera chez le mal méchant pour le détruire
Bombe de silence et couteau d’argent
Nous mettrons le mal à feu et à sang
Un soleil rouge, un soleil blanc
Nous mettrons le mal à feu et à sang
Un soleil rouge, un soleil blanc, un soleil sombre
Nous mettrons le mal à feu et à sang
Un nuage monte, un autre descend, un jour sans ombre
Puis nous raserons la ville en passant
Quand nous reviendrons le cœur triomphant
Un côté rouge, un côté blanc
Quand nous reviendrons le cœur triomphant
Un côté rouge, un côté blanc, un côté homme
Quand nous reviendrons le cœur triomphant
Alors vous direz ce sont nos enfants, quel est cet homme
Qui les a menés loin de leurs parents
Je remonterai sur mon cerf-volant
Un matin rouge, un matin blanc
Je remonterai sur mon cerf-volant
Un matin rouge, un matin blanc, un matin blême
Je remonterai sur mon cerf-volant
Et vous laisserez vos cent mille enfants chargés d’eux-mêmes
Pour jeter les dés dans la main du temps
© Les éditions du Vent qui Vire
Chanson du temps perdu
Il n’a plus de temps à perdre
Il n’y a que du temps perdu
Touche mes mains calme mes lèvres
Couche tes pieds tout près des miens
Marche et marche et neige au loin
Cherche et cherche on a perdu Amour
Il n’y a plus de jours à vendre
Il n’y a que chemins vendus
Il n’a plus de temps à perdre
Il n’y a que du temps perdu
Il n’y a plus de jours à vendre
Il n’y a que des jours vendus
Cache mon ombre ouvre les lèvres
Sache mon nom trouve le tien
Neige et vente et pleuve au loin
Pleure et pleure on a vendu Amour
Il n’y a plus de jours à vendre
Il n’y a que du temps perdu
Il n’y a plus de cherche à faire
Il n’y a que chemin perdu
Touche ma joue hâte ma vie
Bouge tes mains trouve mon pas
Larmes et rire et cœur tout près
Chante et chante on a trouvé Amour
Il n’a plus de temps à perdre
Il n’y a que du temps perdu
© Les éditions du Vent qui Vire
LA COMPLAINTE
N’en veuillez pas à ma complainte
Qui m’est venue de l’air du temps
Plus vieille que moi de vingt ans
C’est dans ma tête qu’elle tinte
Depuis longtemps je l’eus reconnue entre maintes
Elle est de quand j’aurai dans l’aile
Le plomb qui vous aura déplu
De quand vous ne m’aimerez plus
Mes amis qui m’êtes fidèles
Quand j’aurai eu ma part de retour d’hirondelles
À vivre demain tout de suite
Cela me fait peu d’aujourd’hui
Si je m’attarde au bord d’un puits
À boire trop peu et trop vite
Une eau qui fuit c’est que ma course est bien petite
Je ne sais ce qu’il vous en semble
Mais nous aurons touché du doigt
La surface des autrefois oui ne nous ont pas vus ensemble
Et sous le toit c’est toute la maison qui tremble
À vous de parler de mon village
J’avais vu la ville à l’envers
Une île à tort et à travers
À plus de ports et plus de plages
Et l’eau et l’air et le partage des nuages
En voulant tromper ma fatigue
L’ennui la peur la nuit le froid
J’ai chaussé d’un pied maladroit
Le soulier vivant de la gigue
Ce pas de quoi se passait d’arme aussi d’intrigue
J’ai remarqué que l’or en poudre
L’argent le fer le plomb surtout
Faisaient toujours les mêmes trous
Dans les hommes longs à recoudre
Toujours debout le héros attire la foudre
J’aime à faire aussi révérence
En l’an mil neuf cent vingt qui vient
À celles dont je me souviens
Et qui me sont mes espérances
Mon quotidien et ma parole et mon silence
© Les éditions du Vent qui Vire
QUAND VOUS MOURREZ DE NOS AMOURS
Quand vous mourrez de nos amours
J’irai planter dans le jardin
Fleur à fleurir de beau matin
Moitié métal moitié papier
Pour me blesser un peu le pied
Mourez de mort très douce
Qu’une fleur pousse
Quand vous mourrez de nos amours
J’en ferai sur l’air de ce temps
Chanson chanteuse pour sept ans
Vous l’entendrez, vous l’apprendrez
Et vos lèvres m’en sauront gré
Mourez de mort très lasse
Que je la fasse
Quand vous mourrez de nos amours
J’en ferai deux livres si beaux
Qu’ils vous serviront de tombeaux
Et m’y coucherai à mon tour
Car je mourrai le même jour
Mourez de mort très tendre
À les attendre
Quand vous mourrez de nos amours
J’irai me pendre avec la clef
Au crochet des bonheurs bâclés
Et les chemins par nous conquis
Nul ne saura jamais par qui
Mourez de mort exquise
Que je les dise
Quand vous mourrez de nos amours
Si trop peu vous reste de moi
Ne me demandez pas pourquoi
Dans les mensonges qui suivraient
Nous ne serions ni beaux ni vrais
Mourez de mort très vive
Que je vous suive
© Les éditions du Vent qui Vire
Discographie
Pays du fonds de moi (1973, Le Nordet, GVN-1002)Enregistrement public au T.N.M. (1973, Le Nordet, GVN-1005).
J’ai vu le loup, le renard, le lion (1974, Les Productions du 13 août, VLC-13).
J’ai planté un chêne (1976, Le Nordet, GVN-1007).
À l’encre blanche (1977, Le Nordet, GT-101).
Poèmes lus par Gilles Vigneault sur un fond musical de Gaston Rochon.
Au doux milieu de vous (1977, Kébec-Disc, KD-937).
Gilles Vigneault à Bobino (1977, Le Nordet, GVN-1008/1009).
Comment vous donner des nouvelles... (1978, Le Nordet, GVN-1010).
Avec les mots du dimanche (1979, Le Nordet, GVN-1011/12).
Combien de fois faut-il parler d’amour ? (1982, Le Nordet, GVN-1013).
Un jour je ferai mon grand cerf-volant (1983, Le Nordet, GVN-1014).
Chansons, contes et comptines (1986, Le Nordet, VQV-1001).
Mets donc tes plus belles chansons ensemble (1986, Le Nordet, GVNC-1016, Compilation).
Les îles (1987, Le Nordet, GVN-1015).
Le chant du portageur (1992, Le Nordet, GVNC-1821).
La collection émergence (1995, Sony Musique, CK 91072/91073, Compilation).
C’est ainsi que j’arrive à toi (1996, Le Nordet, GVNC-1822).
Au doux milieu de vous (1998, Le Nordet, GVNC-2-1825, Compilation).
40 ans de spectacle (2000, Le Nordet, GVNC-2-1826).
Voyagements (2000, Le Nordet, GVNC-2-1827).
Le cabaret des refrains (2001, GSI Musique, GSIC-977).
Au bout du coeur (2003, Le Nordet, GVNC-2-1828).
Le petit roi (2004, Jaune, PJC 1133).
2004 : Un dimanche à Kyoto, Chansons, contes et comptines de Gilles Vigneault
2006 : Les quatre saisons de Piquot : conte symphonique de Gilles Vigneault et Marc Bélanger
2008 : Arriver chez soi